SAISON UN - BRYAN MANGIN

Analyse poussée des kanji

Introduction

Nous voici arrivé sur un cours très important où nous allons récapituler tout ce que nous avons vu jusqu’à présent au sujet des kana et des kanji. Nous n’allons pas vraiment découvrir quoi que ce soit de nouveau, ce cours vise simplement à apprendre à analyser les kanji. Je ne sais plus si je vous l’ai déjà dit (ou peut-être l’ai-je déjà dit dans la FAQ) mais comprendre une langue est très important.
Comprendre une langue, cela veut dire comprendre comment fonctionne cette langue, pourquoi tel élément fonctionne de cette façon et pas d’une autre et comment la langue s’est construite car je pense, avec certitude, que cela facilite la compréhension et l’apprentissage. Et ce cours sur l’analyse poussée des kanji est là pour vous aider à mieux comprendre les hiragana, les katakana et les kanji. Donc, soyez très attentifs.
Je ne vous cache pas que ce cours sera long, plus long que d’habitude mais tout ce que nous allons voir est très important alors lisez bien tout ce qui va suivre.

1/ Différence de prononciation

La première chose que j’aimerais vous faire remarquer, c’est une petite différence de prononciation entre les lectures purement japonaises et les lectures sino-japonaises. Commençons avec les lectures purement japonaises :
きた
みなみ
ひがし
にし
うみ
さかな
すな
くに
みやこ
Bien. Maintenant, voyons les lectures sino-japonaises :
ホク
ナン
トウ
セイ
カイ
ギョ
オウ
コク
キョウ
ホン
チュウ
ニチ
Est-ce que vous remarquez que nous avons une différence notable entre toutes ces lectures purement japonaises et toutes ces lectures sino-japonaises ?
Le premier point est que les prononciations sino-japonaises sont très souvent constituées de deux syllabes. Puisque les prononciations chinoises étaient à la base monosyllabique, lorsqu’elles ont été katakanisé, les japonais se sont retrouvés avec des prononciations composées de deux syllabes. Par exemple :
ホク
トウ
セイ
カイ
コク
Puis, de temps à autre, nous allons trouver des combinaisons qui sont très fréquentes en sino-japonais :
キョウ
チュウ
Les lectures purement japonaises, si nous les observons attentivement sont bien souvent composé de deux, trois, parfois quatre syllabes, et sont composées de kana de base. Donc, nous n’avons jamais de combinaisons et jamais d’allongements. Observez bien :
きた
みなみ
ひがし
にし
うみ
さかな
Notez que, de temps en temps, nous avons des accents comme dans ひがし. Nous avons le qui est également un kana de base entièrement indépendant du . Mais sinon, nous n’avons jamais de combinaisons et jamais d’allongements. Alors, qu’est-ce que cela veut dire ? Quelle conclusion pouvons-nous tirer de tout cela ? Eh bien, c’est très simple. Les combinaisons et les allongements n’existent pas, de base, dans la langue japonaise, ça n’existe pas en purement japonais.
Quand nous avons fait le cours sur les katakana, nous avons vu les nouvelles combinaisons, et nous nous en sommes servies pour écrire des mots en langues étrangères. Des mots tirés du français, de l’anglais, de l’espagnol… dont les phonétiques n’existaient pas en japonais. Mais les toutes premières combinaisons que les japonais ont créées, ce n’était pas pour écrire leur propre langue, c’était pour écrire la première langue étrangère qu’ils ont eu à katakaniser : le chinois.
Et les allongements, c’est pareil. Les allongements n’existent pas de base en japonais et ont été créés pour retranscrire au mieux les phonétiques des idéogrammes chinois. Et il est très important de le savoir pour bien comprendre les différences de prononciations entre les lectures purement japonaises et les lectures sino-japonaises. Si nous reprenons certaines lectures sino-japonaises, nous notons qu’il y a des allongements :




キョ
Sachez que c’est quelque chose qui arrive très fréquemment en sino-japonais.
Alors, ce que vous devez être capable de faire, c’est de reconnaître, rien qu’en entendant un mot, des lectures purement japonaises tout en les différenciant des lectures sino-japonaises. A l’écrit, c’est très facile car un kanji seul, c’est du purement japonais et deux kanji ou plus combinés, c’est du sino-japonais. Mais ne vous inquiétez pas, à l’oral, c’est également possible.
Je viens de vous dire qu’en purement japonais, nous avions des kana de base mis les uns après les autres tandis qu’en sino-japonais, nous avions très souvent des allongements.
Maintenant, je vais vous donner une petite liste de mots en purement japonais et une petite liste de mots en sino-japonais. Entraînez-vous à les prononcer oralement et entraînez votre cerveau à bien faire la distinction entre des prononciations purement japonaises et des prononciation sino-japonaises. Je vous donne les mots d’abord sans les kanji. L’essentiel est de vous concentrer sur la prononciation de chaque mot.
Commençons avec des mots purement japonais :
あき
そら
なつ
あらし
にわとり
かみなり
ひかり
むし
ふゆ
しま
たから
こころ
くち

Voilà ! Ce sont des mots purement japonais. Je vous donne maintenant les kanji pour tous ces mots ainsi que leur signification. Comme vous vous en doutez, ces mots sont composés d’un seul kanji :
. あき . automne
. そら . ciel
. なつ . été
. あらし . tempête, ouragan
. にわとり . poule
. かみなり . foudre
. ひかり . lumière
. つき . lune ; mois (nous verrons ce kanji plus en détail quand nous aborderons les mois de l’année)
. むし . insecte
. ふゆ . hiver
. しま . île
. たから . trésor
. こころ . coeur
. くち . bouche

Voyons maintenant des mots sino-japonais :
リンゴ
ビョウイン
タンゴ
タンゴシュウ
シュウチュウ
ユウレイ
ミョウヤク
チキュウ

Voilà ! Ce sont des mots sino-japonais. Je vous donne maintenant les kanji pour tous ces mots ainsi que leur signification. Comme vous vous en doutez, ces mots sont composés de plusieurs kanji :
林檎 . リンゴ . pomme
病院 . ビョウイン . hôpital
単語 . タンゴ . vocabulaire (vous verrez souvent ce mot dans les leçon de vocabulaire à venir)
単語集 . タンゴシュウ . lexique
集中 . シュウチュウ . concentration
集中力 . シュウチュウリョク . capacité de concentration
幽霊 . ユウレイ . fantôme
妙薬 . ミョウヤク . remède miracle
地球 . チキュウ . Terre (planète)

Voilà ! En vous exerçant à l’oral et à force d’entraîner votre oreille à entendre des mots, tantôt purement japonais tantôt sino-japonais, vous devriez être capable de reconnaître tout de suite si tel mot est purement japonais, si tel autre mot est sino-japonais. Ainsi, quand vous reconnaîtrez un mot purement japonais, vous saurez que ce mot est composé d’un seul kanji, quand vous reconnaîtrez un mot sino-japonais, vous saurez que ce mot est composé de deux kanji ou plus.
Et à force d’entraînement, vous pourrez même savoir précisément quel est ce mot et quel est/sont le/les kanji qui compose(nt) ce mot.
Par exemple, nous savons que 単語 . タンゴ signifie « vocabulaire » et que ce mot est composé de deux kanji. Vous avez le son タン, prononciation sino-japonaise de ce kanji , et vous avez le son qui vient de ce kanji, . Et il est facile de deviner que ce mot est composé de deux kanji puisque la première prononciation sino-japonaise, c’est タン qui se termine par un , chose qui n’existe qu’en sino-japonais (en tout cas dans 99% des cas). Et le son après un est forcément la prononciation sino-japonaise d’un autre kanji.
Tout est une question d’entraînement et bien sûr de mémorisation de vocabulaire par la pratique écrite, par la lecture et par l’écoute. Maintenant, si vous entendez 単語集 . タンゴシュウ, vous savez que ce mot est composé cette fois de trois kanji.
Il est important de bien comprendre toutes les subtiles différences entre les prononciations purement japonaises et les prononciations sino-japonaises car, de cette façon, cela facilite incroyablement l’apprentissage et la mémorisation de nouveaux mots de vocabulaire.
La plupart d’entre vous auront peut-être déjà remarqué, si vous commencez déjà à chercher des mots dans certains dictionnaires ou sur des sites web, que les mots sino-japonais, à défaut d’être écrit en kanji sont écrit très souvent en hiragana. Le plus souvent pour plus de simplicité. Mais au final, quand un mot sino-japonais écrit habituellement en kanji est écrit en hiragana, si vous ne connaissez pas ce mot ou si vous ne parvenez pas le reconnaitre, vous aurez du mal à savoir s’il s’agit d’un mot sino-japonais ou purement japonais. Parfois, cela peut prêter à confusion. Donc, à mon sens, il vaut mieux, quand on étudie le japonais, écrire les mots sino-japonais en katakana pour bien indiquer qu’il s’agit d’une lecture sino-japonaise.
Je vous assure que cette façon de faire va vous simplifier la vie au plus haut point. L’étude des kanji est pratiquement la bête noire de nombreux étudiants qui se grattent la tête en se demandant comment faire pour retenir autant de kanji et les prononciations qui vont avec. Mais une fois que vous avez compris comment tout cela fonctionne, vous vous amuserez comme des petits fous.

2/ Écrire des mots sino-japonais en hiragana dans des phrases

Maintenant, il est temps que je vous explique pourquoi nous trouvons des allongements dans des mots sino-japonais tel que je vous l’ai enseigné dans les cours sur les hiragana alors que les allongements avec les katakana se font avec un tiret normalement. C’est comme cela que je vous l’ai enseigné il y a quelques cours en arrière.
Pour mieux comprendre, commençons tout d’abord par une petite phrase en japonais :
鳥の歌だ。
C’est le chant d’un oiseau.
Dans cette phrase, nous avons deux mots purement japonais : . とり qui veut dire « oiseau » et . うた qui veut dire « chant ».
Imaginons que je ne sais pas écrire un de ces mots, par exemple le mot . うた. Je peux l’écrire en hiragana. C’est tout à fait possible, d’ailleurs, au Japon, les enfants japonais qui ne connaissent pas encore tous les kanji écrivent les mots qu’ils ne connaissent pas en kanji en hiragana. C’est tout à fait normal et cela vous arrivera certainement à vous aussi (bien qu’il vaille mieux connaître ses kanji !)
Je peux donc écrire cette phrase :
鳥のうただ。
C’est le chant d’un oiseau.

Prenons maintenant la phrase suivante :
歌手のポスターだ。
C’est le poster d’un chanteur.

Dans cette phrase, nous avons un mot tiré de l’anglais, ポスター qui veut dire « poster » et un autre mot sino-japonais, 歌手. カシュ qui veut dire « chanteur ».
À l’écrit, il est évident que le mot 歌手 . カシュ est sino-japonais, bien que nous n’ayons pas d’allongement, ce mot sonne sino-japonais. Cela n’est peut-être pas évident pour vous pour l’instant mais à force d’entraînement, je vous assure que vous finirez par percevoir la différence. C’est un peu comme nous, avec notre langue française, qui contient beaucoup de mots tirés du latin et du grec. Nous avons par exemple le mot « chronomètre », or si vous vous y connaissez un chouïa en étymologie – sans être un professionnel non plus – vous savez que le mot « chrono » vient du grec khrónos (χρόνος) qui veut dire « le temps ». Eh bien, en japonais, à force d’entraînement, vous verrez, vous arriverez un jour à déduire que tel mot est purement japonais ou sino-japonais rien qu’en l’entendant.
Imaginons que je ne sais pas écrire le mot 歌手 . カシュ, je vais donc l’écrire en kana. Mais vais-je l’écrire en hiragana ou en katakana ? Logiquement, vous répondriez « on va l’écrire en katakana, c’est une lecture sino-japonaise. ». Et pourtant, non ! Là est toute la nuance. Dans ma phrase, je vais l’écrire en hiragana :
かしゅのポスターだ。
C’est le poster d’un chanteur.

À la base, les lectures sino-japonaises, on les écrit en katakana car il s’agit de sons étrangers katakanisés. Les lectures purement japonaises, nous les écrivons en hiragana car il s’agit de mots purement japonais. Mais aujourd’hui, tous les mots dits purement japonais et les mots dits sino-japonais sont aujourd’hui tous considéré comme du japonais à part entière. Et dans la langue écrite, un mot sino-japonais s’écrira en hiragana.
Cela fait tellement de siècles que les japonais ont intégré les mots sino-japonais qu’ils ne les considèrent plus tellement eux-mêmes comme des mots étrangers. C’est devenu tellement courant au sein de la langue que maintenant, un mot sino-japonais, quand ils ne le connaissent pas à l’écrit, ils l’écrivent en hiragana.
Aujourd’hui, les mots qui sont considérés comme « étrangers » sont les mots tirés des langues occidentales comme l’anglais, le français, l’espagnol, l’allemand… Les mots issus de ces langues seront écrits en katakana dans la langue japonaise car considérés comme « étrangers ». Donc, nous écrivons bien le mot 歌手 . カシュ en hiragana dans notre phrase :
かしゅのポスターだ。
C’est le poster d’un chanteur.

Et vous voyez bien que le mot ポスター qui est un mot tiré de l’anglais et apparu très récemment dans la langue japonaise – il y a sans nul doute moins de cent ans – est considéré comme un mot étranger, donc nous l’écrivons en katakana.
Pour faire un parallèle avec notre langue française à nous, je reprends l’exemple du mot « chronomètre » avec « chrono » qui vient du grec khrónos (χρόνος) et « mètre » qui vient du latin metrum. Nous avons combiné ces deux mots étrangers à la base pour créer le mot « chronomètre » qui est considéré comme un mot totalement français.
Le mot « chronomètre » dans sa prononciation actuelle avec son orthographe actuelle est considéré comme un mot uniquement français.
Souvenez-vous, depuis que nous avons commencé les cours de vocabulaire, je vous mets bien en évidence la prononciation des mots. Si le mot est purement japonais, sa prononciation est écrite en hiragana et si le mot est sino-japonais, sa prononciation est écrite en katakana. Ainsi, cela vous donne un repère visuel qui vous aide à mémoriser le mot et la nature de sa prononciation. Je continuerai à le faire pour tous les cours de vocabulaire tout au long de votre apprentissage, il n’y a donc pas d’inquiétude à avoir là-dessus.
Mais, dans les phrases, quand vous ne connaissez pas l’écriture en kanji d’un mot, vous l’écrivez en hiragana tout comme les japonais. De plus, quand vous avez un texte en japonais avec des kanji bien entendu, et des hiragana et des katakana, et que vous ne savez pas comment se prononce tel ou tel kanji, avec un peu de chance, vous avez la prononciation des kanji écrite juste au-dessus, en hiragana bien sûr. Ces prononciations qui sont écrites juste au-dessus des kanji, qu’ils s’agissent de prononciations purement japonaises comme sino-japonaises, ont un nom. On les appelle des furigana.
On peut souvent trouver des furigana dans les livres destinés aux enfants, ce qui leur permet de découvrir de nouveaux mots, de savoir comment un mot se prononce, ce qui est très important dans la démarche d’apprentissage. On peut aussi trouver des furigana dans la plupart des mangas et sur des cartes de menu au restaurant, mais il est toujours plus intéressant d’apprendre ses kanji par cœur, ne l’oubliez pas.
De plus, n’oubliez pas ce que je vous ai enseigné dans les parties précédentes sur les allongements. En hiragana (pour les mots typiquement japonais avec une prononciation sino-japonaise), l’allongement se fait sur la voyelle. Un allongement va donc durer un temps supplémentaire, en doublant phonétiquement la voyelle d’un kana donné. À l’écrit, l’allongement se fait avec les hiragana , , , , . Et en katakana (pour les mots considérés comme étrangers de nos jours), l’allongement se fait avec un tiret, ce qui permet de savoir que le mot en question est issu d’une langue étrangère occidentale.
Voilà pourquoi quand je vous présente un nouveau kanji, je vous l’écris avec sa prononciation purement japonaise et sa prononciation sino-japonaise.
Je vous présente maintenant ci-dessous deux nouveaux kanji pour un mot que nous avons vu plus haut :
. つち . , → sol, terre
. たま . キュウ → boule, sphère

Et si je dois l’écrire dans une phrase, par exemple :
地球にいる。
Je suis sur Terre.

Imaginons que je ne sais pas écrire le mot 地球 . チキュウ, je vais donc l’écrire en hiragana.
ちきゅうにいる。
Je suis sur Terre.

Note : vous aurez remarqué que le kanji (sol, terre) a deux prononciations sino-japonaises. Nous y reviendrons un peu plus bas.
Ouf ! Nous sommes enfin arrivés au bout de cette deuxième sous-partie. Je sais qu’il y a de quoi se sentir embrouillé, je me suis efforcé de tout vous expliquer dans les moindres détails et j’espère que vous n’êtes pas perdus. Cela dit, une fois que vous aurez bien compris tout cela, que vous savez bien faire la différence entre du purement japonais et du sino-japonais, que vous savez utiliser habilement les katakana et les hiragana, tout ira pour le mieux.
Je vous assure que tout vous paraîtra d’un seul coup beaucoup plus simple. Encore une fois, comprendre les langues est quelque chose de très important, même si cela veut dire s’attarder longuement sur des explications mais je vous garantis que cela en vaut la peine. Votre apprentissage de la langue japonaise n’en sera que simplifié.

3/ Les homophones en japonais

Il y a quelques cours en arrière, je vous avais expliqué qu’il y a beaucoup d’homophones en japonais. Ces homophones sont surtout présents au niveau des prononciations sino-japonaises, et il y en a quand même moins au niveau des prononciations purement japonaises.
Pour illustrer cela, regardez bien ci-dessous les quelques exemples que je vous donne :
. ほし . セイ → étoile
西 . にし . セイ → ouest
Nous voyons bien que les prononciations sino-japonaises sont identiques.

. くに . コク → pays
. くろ . コク → noir
Ici encore, nous voyons bien que les prononciations sino-japonaises sont identiques.

. ひがし . トウ → est
. ふゆ . トウ → hivern
Ici encore, nous voyons bien que les prononciations sino-japonaises sont identiques.

Les homophones en sino-japonais sont donc très fréquents et le seront beaucoup moins en purement japonais. Et ici, je parle bien d’homophones, c’est-à-dire qui se prononce de la même manière, je NE parle PAS d’homonymes qui peuvent avoir la même graphie. Ici, nous parlons de kanji, or chaque kanji est différent et unique, et ne s’écrit donc pas du tout de la même façon.

4/ Des kanji avec uniquement une lecture sino-japonaise

Il arrive que certains kanji aient une lecture uniquement sino-japonaise. Ces kanji n’ont donc aucune lecture purement japonaise mais comment cela est-il possible ?
Bon, rappelez-vous de l’histoire que je vous ai déjà raconté sur l’origine des kanji. Nous savons que les japonais ont découvert le principe de l’écriture en récupérant les idéogrammes chinois. Ils ont posé leur mots à eux sur ces idéogrammes et ont même récupéré les prononciations chinoises de ces idéogrammes qu’ils ont katakanisés pour les adapter à leur langue. Mais les japonais n’avaient pas forcément un mot qui était propre à leur langue à eux pour tous les kanji qu’ils ont récupérés. Dans ce cas, qu’est-ce qu’ils ont fait ? Ils se sont contentés de katakaniser la prononciation chinoise pour l’adapter à leur langue, et c’est tout.
Par exemple, ils n’avaient pas de mots pour dire « roi ». Or, il existe un kanji pour dire « roi », c’est celui-ci : . Ils ont récupéré la prononciation chinoise, l’ont katakanisé, ce qui leur a donné :
. オウ → roi (pas de prononciation purement japonaise)
Et ils ont gardé le kanji comme cela.
Ils ont fait de même avec le kanji de « la semaine » :
. シュウ → semaine (pas de prononciation purement japonaise)
Également avec le kanji du « point » :
. テン → point (pas de prononciation purement japonaise)
Ce cas de figure est assez fréquent. Bien entendu, tous les kanji de la langue japonaise ont tous, sans exception, au moins une lecture sino-japonaise puisque les kanji viennent au départ de la Chine et avaient tous une prononciation chinoise à la base.
Ensuite, il existe tout de même des kanji qui ont uniquement une prononciation purement japonaise. C’est-à-dire que les japonais ont créés des kanji spécifiquement pour représenter certains mots, certaines notions qu’ils possédaient déjà dans leur langue à eux, en purement japonais. Ce cas de figure est très rare, je n’ai malheureusement pas d’exemples à vous donner ici mais si vous en croiser, c’est normal, cela arrive.
Enfin, nous allons avoir certains kanji qui auront plusieurs lectures purement japonaises et plusieurs lectures sino-japonaises. Cela par contre, est tout de même assez fréquent. Alors comment cela est-il possible ? Simplement parce qu’un kanji, c’est avant tout un idéogramme, il ne représente pas simplement un objet ou un animal ou une personne, il représente surtout une idée, et une idée peut avoir plusieurs nuances. Et donc pour représenter ces nuances, les japonais ont parfois attribué à un même kanji plusieurs prononciations. Pour vous donner un exemple, prenons le kanji de la lune :
. つき . ゲツ / ガツ → lune ; mois

Il n’y a qu’une seule prononciation purement japonaise mais deux prononciations sino-japonaises. Pourquoi ? Bon, la prononciation purement japonaise つき permet de dire « la lune » en parlant de notre bon vieux satellite que nous voyons le soir en levant la tête. Et les deux prononciations sino-japonaises, à quoi correspondent-elles ? La première, ゲツ, permet de dire « la lune » quand le kanji est combiné avec un autre ; et la deuxième prononciation, ガツ, permet de dire « le mois ». Car une lune met un mois entier pour se remplir et se vider. Les japonais ont donc décidé d’utiliser le même kanji mais des prononciations différentes, tantôt pour parler de la lune tantôt pour parler du mois.

5/ La problématique des homophones

Je peux enfin revenir sur le kanji (sol, terre). Un peu plus haut, nous avons vu la prononciation purement japonaise et les deux prononciations sino-japonaises de ce kanji que je vous remets ci-dessous :
. つち ./ → sol, terre

Pour ce kanji, si nous avons deux prononciations sino-japonaises, ce n’est pas parce que chaque prononciation sino-japonaise a un sens différent et que le même kanji se prononce différemment selon le sens. Non, l’idée exprimée par le kanji reste la même, l’idée du « sol », de la « terre ». Simplement, selon les combinaisons de kanji incluant le kanji (sol, terre), il peut arriver qu’il soit plus simple de prononcer le son que le son . Je vais vous donner quelques exemples de mots incluant le kanji (sol, terre) avec tantôt la prononciation , tantôt la prononciation . Peut-être que cela ne vous semblera pas évident au début mais entraînez-vous à prononcer plusieurs fois les mots ci-dessous :
地心 . チシン → centre de la Terre
地図 . チズ → carte, plan
地口 . ジグチ → calembour, jeu de mots
地点 . チテン → point, endroit, lieu (sur une carte)

Nous pouvons même pousser l’explication plus loin. Il faut savoir que certaines prononciations pour certains mots ont été choisi, non pas seulement pour des facilités de prononciation mais aussi pour réduire le nombre de mots homophones au sein de la langue japonaise. Par exemple, le mot 地心 . チシン n’est pas difficile à prononcer. Mais imaginons, pourquoi ce mot ne se prononcerait-il pas ジシン ? Ce n’est pas plus compliqué, mais si vous cherchez dans le dictionnaire, vous verrez qu’il y a déjà plein de mots qui se prononcent déjà ジシン. Or, nous avons vu qu’en japonais, il existe beaucoup d’homophones, surtout au niveau des prononciations sino-japonaises. À l’écrit, cela ne pose aucun problème tant que vous connaissez vos kanji mais à l’oral, par contre, c’est bien plus compliqué. Quand vous avez beaucoup de mots homophones dans une langue, et surtout quand tous ces mots homophones sont couramment utilisés au quotidien, à l’oral, cela peut conduire à certaines confusions même en dépit du contexte de la conversation qui peut aider à faire la distinction.
Si nous prenons le mot 地点 . チテン , c’est la même chose. Les japonais auraient pu décider de prononcer ce mot ジテン, ce n’est pas plus compliqué. Mais il existe déjà plein de mots se prononçant ジテン en japonais. C’est notamment le cas du mot 辞典 . ジテン qui veut dire « dictionnaire » par exemple.
Un autre moyen de lutter contre le trop plein d’homophones dans une langue est d’avoir des synonymes, se prononçant différemment, pour les mots susceptibles d’être les plus couramment utilisés. Ainsi, le mot « dictionnaire » possède jusqu’à six combinaisons de kanji et quatre prononciations différentes en japonais :
辞書 . ジショ . le dictionnaire
辞典 . ジテン . le dictionnaire
字書 . ジショ . le dictionnaire
字引 . ジビキ . le dictionnaire
字典 . ジテン . le dictionnaire
言葉典 . ことばテン . le dictionnaire

Tous ces mots veulent dire exactement la même chose, il désigne exactement la même chose. Et si vous êtes attentif, vous remarquez que le mot 言葉典 . ことばテン mélange prononciation purement et sino-japonaise. Cela existe et nous verrons ce cas de figure plus en détail dans le cours suivant.

6/ Les okurigana

Il arrive également que certains kanji soit suivi d’un hiragana. Je vous en avais brièvement parlé au tout début en vous disant que, parfois, les hiragana vont servir de terminaisons aux verbes et aux adjectifs. Ces kanji-là sont des kanji à lire en lecture purement japonaise. Pour vous donner un exemple :
. くろ() . コク → noir
Nous l’avons vu plus haut. Il s’agit du kanji de la couleur noire, le nom de la couleur, le noir. D’ailleurs, le prochain cours de vocabulaire à venir portera sur les couleurs. Et ici, j’en profite pour vous apporter dès maintenant une petite précision par rapport à ce cours de vocabulaire que vous aurez prochainement.
Vous devez bien faire la différence entre le nom de couleur, dans l’exemple ci-dessus « le noir », et l’adjectif qualificatif « noir ». Si je reprends l’exemple ci-dessus :
. くろ → noir (dans le sens « le nom de la couleur »)
. くろい → noir (dans le sens « l’adjectif qualificatif »)
Nous ne verrons les adjectifs qualificatifs en japonais qu’à partir de la saison trois ou quatre, donc pour l’instant, retenez simplement cela dans un coin de votre tête.
Ces hiragana qui servent parfois de terminaisons aux kanji, on les appelle des okurigana. Vous en verrez très souvent quand nous aborderons les verbes et les adjectifs qualificatifs.
Allez, je vous donne un autre exemple avec un verbe cette fois. Je vous donne le verbe « manger » :
食べる . たべる . ショク → manger
Nous avons donc une prononciation sino-japonaise, ショク et une prononciation purement japonaise, たべる. Au niveau du kanji, nous avons donc deux okurigana. Le kanji en lui-même représente simplement le . Et nous aurons également une autre lecture purement japonaise du même kanji qui est 食う . くう. Et les deux veulent dire manger, simplement nous aurons une petite nuance :
食べる . たべる . ショク → manger
食う . くう . ショク → bouffer
Donc, 食う . くう, vous le voyez, c’est un peu moins poli. C’est le même kanji mais avec des prononciations purement japonaises différentes et donc un sens différent, légèrement nuancé que nous traduisons en français par deux verbes exprimant cette nuance. Et dans la foulée, vous avez des okurigana qui sont également différents selon le verbe.

Conclusion

Ça y est ! Nous sommes enfin arrivés au bout de ce cours. Vous pouvez enfin souffler, posez vos stylos, vos crayons si vous preniez des notes. Ce cours est terminé.
Nous avons vu énormément de choses aujourd’hui mais tout ce que nous avons vu ici est très important. Certains diront que je suis tatillon mais je suis comme ça et c’est tout. J’aime que les choses soient bien faîtes. Constructives et ordonnées. Je peux vous assurer qu’une fois que vous aurez parfaitement compris toutes ces histoires sur les hiragana, les katakana, les kanji, les prononciations purement et sino-japonaises, la problématique des homophones, les okurigana… l’entièreté de la langue japonaise vous paraîtra beaucoup plus simple.
Je n’ai pas grand-chose d’autre à dire si ce n’est de bien prendre le temps de relire cette leçon pour bien assimiler tout ce que nous venons de voir. Il vous faudra sans doute plusieurs relectures pour bien mémoriser tout cela donc allez-y tranquillement.
Je vous donne ci-dessous une liste de vocabulaire avec tous les mots que nous avons vu aujourd’hui. Apprenez-les par cœur. Vous pourriez bien retrouver la plupart de ces mots dans les cours à venir.
. あき . l’automne
. そら . le ciel
. なつ . l’été
. あらし . la tempête, l’ouragan
. にわとり . la poule
. かみなり . la foudre
. ひかり . la lumière
. つき . la lune ; le mois (nous verrons ce kanji plus en détail quand nous aborderons les mois de l’année)
. むし . l’insecte
. ふゆ . l’hiver
. しま . l’île
. たから . le trésor
. こころ . le cœur
. くち . la bouche
. つち . le sol, la terre
林檎 . リンゴ . la pomme
病院 . ビョウイン . l’hôpital
単語 . タンゴ . le vocabulaire
単語集 . タンゴシュウ . le lexique
集中 . シュウチュウ . la concentration
集中力 . シュウチュウリョク . la capacité de concentration
幽霊 . ユウレイ . le fantôme
妙薬 . ミョウヤク . le remède miracle
地球 . チキュウ . la Terre (planète)
. ほし . l’étoile
西 . にし . l’ouest
. くに . le pays
. くろ . noir
. ひがし . l’est
. オウ . le roi
. シュウ . la semaine
. テン . le point
地心 . チシン . le centre de la Terre
地図 . チズ . la carte, le plan
地口 . ジグチ . le calembour, le jeu de mots
地点 . チテン . le point, l’endroit, le lieu (sur une carte)
辞書 . ジショ . le dictionnaire
辞典 . ジテン . le dictionnaire
字書 . ジショ . le dictionnaire
字引 . ジビキ . le dictionnaire
字典 . ジテン . le dictionnaire
言葉典 . ことばテン . le dictionnaire
食べる . たべる . manger
食う . くう . bouffer